Carte blanche à Aurélien Dony
Le jeudi 23 mars, lors de la journée mondiale de la Poésie, a eu lieu le spectacle « Carte blanche à Aurélien Dony » à la Maison de la Poésie de Namur.
« Peut-être qu’on ne sait plus sur quel pied danser, qu’après l’hiver vient le printemps mais qu’on n’a pas la tête aux bourgeons, peut-être qu’on marche sur des ruines. Peut-être aussi qu’à l’heure où j’écris ces lignes, le monde s’est encore enfoncé d’un pas dans la fange et qu’aucun poème n’aura pu l’empêcher. Mais il s’agit de vivre. De garder en soi la force nécessaire pour s’opposer quand il le faut, rire quand c’est possible, aimer dès qu’on le peut. En cela, je pense que le poème peut nous être d’un certain secours. » Voici un exemple de ce qui a pu se dire en cette belle soirée.
Cet événement était l’idée du poète et dramaturge du même nom. Ce Dinantais, assistant en art au Conservatoire de Bruxelles et cofondateur de la compagnie de théâtre l’Absolu, avait accepté une interview le 15 mars pour me parler d’avantage de ce projet.
Détenteur de plusieurs prix tels que Georges Lockem, Geneviève Grand’Ry ou encore Fintro, Aurélien a commencé à baigner dans le lac de la poésie dès son adolescence et a même dérivé vers celui de la chanson assez vite, devenant le chanteur et parolier d’un groupe nommé Géminides.
“L’écriture, c’est une question de confiance, il faut que des gens puissent poser un regard sur l’écriture de l’autre et voir s’il y a quelque chose qui s’y passe même si ce n’est pas grand-chose.”
Depuis, il a fait beaucoup de chemin et tous ces chemins l’ont mené à la Maison de la Poésie. Ce lieu qu’il côtoie depuis tant d’années lors d'ateliers d’écriture ou encore d’activités littéraires et poétiques. Lorsque ce temple de la culture lui a laissé carte blanche, il a profité de cette occasion rêvée pour réunir une équipe.
A ses côtés, 6 autres poète.etesse.s et slameur.euse.s : Jérémie Tholomé, Jan Ducheyne, Timotéo Sergoï, Julie Lombé, Marie Darah et Camille Pier, ainsi que deux musiciens : Jérômes Pâque à la guitare et Céline Chappuis au violoncelle.
Lors de la courte préparation de l'événement, le dramaturge a pu faire confiance à une sorte de hasard, porté par l’idée de rassembler les bonnes personnes, des artistes qu'il aime tant voir et entendre, et dont il apprécie tout particulièrement le travail.
C'est aux alentours de 20h que Aurélien Dony a ouvert le bal, montant sur scène, faisant face à une grande vague de personnes assises devant lui. Son corps a tangué, comme s’il était sur une barque, et il regardait l’horizon. Dans ses paroles, on avait des échos d'autres artistes qui allaient se présenter à nous.
Accompagnés d’une musique qui nous a fait voyager dans un autre monde totalement intemporel, les poètes se sont tenus debout sur l’estrade, ils ont bougé, chancelé et, d’une certaine façon, dansé en lisant leurs textes. Leurs corps parlaient tout aussi bien qu’eux et exprimaient leurs plus profondes émotions.
Devant nous, pas de Rimbaud, de Baudelaire ou autres références assez datées, on s’est trouvé face à un rapport à la poésie qui était viscéral, contemporain et actuel.
“Tout ce que je vis à cette époque-ci n’a pas encore été dit sauf par des personnes de ma génération. C’est la façon dont, intimement, je ressens les choses.”
Certains slammeurs se tenaient sous les spots pour mettre en lumière les pires choses et dénoncer, se servant de la scène comme d’un réel exutoire ou d’une tribune face à la société. D’autres, étaient plus là pour nous soutirer des rires, parfois à gorges déployées. Chacun avait sa façon de dire et de faire, ainsi que son univers.
Je ne connaissais rien à la poésie mais je me suis délecté de leurs mots en entendant leurs maux. J’ai même été tout particulièrement transporté par la performance de Camille Pier, qui était sans aucun doute possible la meilleure manière de finir en beauté cette soirée, non seulement grâce à ses textes des plus poignants mais aussi avec un chant des plus touchants.
Le but de cette soirée n’était pas de conquérir les cœurs qui battaient déjà en rythme mais de rencontrer un nouveau public, de leur montrer qu’il existe autant de formes de poésie que de poète.etesse.s.
“La poésie, ce n’est pas un genre, ce n’est pas une façon d’écrire. Il y a autant de poésie que de poètes. Il faut trouver quelle est sa famille poétique. Alors, oui, lisez encore et encore ou allez écouter.”
De nos jours, on peut accéder à la poésie partout, il n'y a plus nécessairement besoin de se plonger dans les livres, on peut la retrouver partout et même l’écouter dans une bonne chanson ou un bon rap. On peut également se rendre dans des lieux comme la Maison de la Poésie d’Amay à Liège, la boutique MaelstrÖm de Bruxelles avec le FiEstiva, le festival de poésie “Tilleul et Verlaine” dans la commune d’Etalle et bien d’autres endroits encore, pour vraiment être plongé, un bon vers à la main, dans cet univers unique riche en strophes et plein de sens.
Il faut oser prendre le pari de se rendre à une soirée comme celle de “carte blanche” pour faire une belle découverte.